Faire appel à un détective privé dans le cadre d’une procédure judiciaire
Le détective privé est souvent perçu comme quelqu’un qui mène des enquêtes en utilisant tous les moyens, parfois au détriment de la vie privée des individus. Nous allons voir qu’en réalité, c’est une profession réglementée avec un statut précis et des pratiques encadrées par la loi. Notamment, nous aborderons la question de la force probatoire des rapports émis par ces professionnels devant la justice dans divers types de litiges.
Une profession réglementée
La profession d’enquêteur de droit privé est définie à l’article L 621-1 du Code de la Sécurité intérieure comme suit : « Est soumise aux dispositions du présent titre la profession libérale qui consiste, pour une personne, à recueillir, même sans faire état de sa qualité ni révéler l’objet de sa mission, des informations ou renseignements destinés à des tiers, en vue de la défense de leurs intérêts. » Les articles suivants détaillent également le statut et le cadre d’exercice de cette profession. Pour exercer, ils doivent avoir obtenu l’agrément nécessaire auprès du Conseil national des activités privées de sécurité, un organisme rattaché à l’État français.
Les domaines d’intervention d’un détective privé
Lorsque des particuliers sollicitent un détective privé agréé, celui-ci intervient dans divers domaines, notamment :
- Les affaires familiales : cela peut inclure des enquêtes prénuptiales pour vérifier la fidélité d’un futur conjoint, des constats d’adultère dans le cadre d’un divorce, ou des enquêtes sur des détournements de patrimoine pour minimiser des obligations financières.
- La recherche de personnes disparues : cela peut concerner des cas de disparitions volontaires pour échapper à des responsabilités financières ou familiales, ou des disparitions involontaires où les détectives peuvent jouer un rôle crucial dans la localisation de la personne disparue.
- L’abus de faiblesse : dans des situations où un proche est influencé ou manipulé, par exemple, pour rejoindre une secte.
Lorsque des entreprises sollicitent les services d’un détective privé, cela peut permettre de rassembler des preuves dans le cadre de divers litiges, tels que des cas d’arrêts de travail abusifs, de violations du droit de la concurrence, de contrefaçons, d’escroqueries, etc.
Une profession encadrée par la loi
La recevabilité des rapports d’enquêtes des détectives privés en justice fait l’objet d’une jurisprudence très fournie.
Les rapports doivent en effet respecter un certain formalisme (arrêt de la Cour de cassation, dit arrêt Torino, du 7 novembre 1962). Aujourd’hui, ce formalisme est encadré par l’article 202 du Code de Procédure Civile (Cour de cassation, Deuxième Chambre civile, Arrêt nº 1189 du 12 novembre 1997, Pourvoi nº 94-20.322).
La jurisprudence fixe également des règles strictes en matière d’admissibilité de la preuve (loyauté, proportionnalité, respect de la vie privée). Par exemple, il est admis qu’un constat d’adultère est recevable s’il résulte d’une observation dans un lieu public (CA Versailles, 5 juin 2007. – RG n° 05/08465). En droit du travail, le fait de faire suivre son employé pendant des heures pour prouver une concurrence déloyale constitue une violation de sa vie privée (Cass.Soc.26/12/2018 n°2017-16020).
L’implication d’un détective privé dans une procédure judiciaire requiert une appréciation minutieuse des contours légaux et éthiques de la profession, ainsi que de la manière dont leurs rapports sont admissibles devant la justice.